L'ÂGE D'ARGENT
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Quand Tanaephis était jeune, et que le second soleil était plus lointain qu’il n’est aujourd’hui, notre pays vivait sous les auspices d’un éternel printemps.
La terre se réveillait après un long hiver, celui de ceux qui n’étaient pas des chimères, et avec elle, se réveillaient d’étranges maladies. Ces maladies attaquèrent les restes de la première humanité, les hommes, les femmes et les enfants. Certains survécurent, inchangés. D’autres moururent, d’autres encore furent changés, modelés dans leur nature profonde.
De nombreuses et étranges formes de vie virent ainsi le jour en ces temps paradoxaux : hommes à visages d’animaux et aux pouvoirs miraculeux, enfants à la peau bleutée qui étouffaient sur terre et ne pouvaient vivre que dans les profondeurs de l’océan, femmes-vers qui s’enfouissaient dans les dunes de sable et s’accouplaient avec les taupes… Races maladives et fantasmagoriques qui flamboyèrent quelques courtes saisons avant de s’éteindre pour toujours. Stériles et condamnées elles étaient, sauf deux, puis trois, puis d’autres encore. Pas en même temps. Et pourtant certaines se côtoyèrent quelques fragments de millénaires. Tanaephis voulut en effet que ces races survivent, quelques courts instants d’éternité, aux côtés de ceux qu’aujourd’hui nous appelons humains. Elles finirent pourtant elles aussi par s’éteindre ; mais leur marque demeure. Et parfois même, nous la retrouvons dans nos enfants.
Ces races sont celles des légendes : les Elfes, les Orks, les Nains, les Trolls, et dans une certaine mesure, les Pères que vous appelez les Géants.
Il est dit, dans les vieilles histoires, que la nature des Elfes était supérieure à celle de l’humanité. Cela est faux. Les Elfes sont les enfants des premiers, comme les autres races, et comme eux ce sont des êtres de chair et de sang, avec leurs forces et leurs faiblesses.
Il est dit aussi que les Elfes étaient les maîtres du continent : cela est faux également. Nous, les humains, déjà, fondions des villages, commercions, et nous battions.
C’est à cette époque que furent fondées les prémices de ce qui allait devenir plus tard les cités de l’Ouest, les blanches cités batranobans. Mais cela, encore, est une autre histoire…
Les Elfes sont donc bien les enfants de l’humanité, proches de nous, et pourtant différents. Et il est dit, dans les vieilles histoires, que la maladie qui les avait changés leur avait donné la capacité d’absorber ce que nous appelons le Fluide, la force magique résiduelle du grand hiver et de la terre.
Cela est vrai.
Tanaephis est un pays béni, et la force magique y coule comme l’eau irrigue un champ. Elle irradie comme la lumière du plus beau jour de l’été. Cette force, certains savent l’utiliser. On dit que les Gadhars, certains, savent la manier pour soigner, pour prédire le futur, et pour d’autres choses encore. Que certains avaient même appris à la dévorer, que ceux-là sont devenus les fameux Géants et ont construit des villes démesurées dans les jungles du Sud. On dit que les Armes elles-mêmes utilisent le Fluide ; leur Exal.
Mais chez les Elfes, l’art de maîtriser les forces magiques atteignit un niveau que nul n’a jamais surpassé. C’était leur don, offert par la maladie. Le Fluide était attiré par eux et leur pénétrait le corps. Une puissance brute, parfois dangereuse, qu’ils mirent des siècles à contrôler, à expérimenter, à modifier, à s’altérer, et à asservir à leur volonté.
Et durant ces siècles d’études, la vie ne fut pas facile pour eux. Les Nains, les Orks et – nous – les humains les surpassaient en force, en nombre, et en connaissance, et les Elfes étaient d’éternels errants, toujours pourchassés et massacrés, à cause justement de cette magie qui était en eux et que les autres jalousaient sans la comprendre.
Puis, peu à peu, après de nombreux tâtonnements et de nombreux échecs, ils apprirent à manier leur don, leur sang, pour se protéger, pour se battre, pour guérir, pour tuer, et pour se modifier encore. Pour les Elfes, ce fut alors le début de l’âge d’argent. L’art de la magie se passait de parents en enfants, et les Elfes fondèrent sur le continent des colonies prospères et puissantes. Les Orks n’osaient plus les attaquer de front, et les humains qui les avaient pourchassés se terraient maintenant, par crainte de leurs pouvoirs.
Rares étaient ceux d’entre nous à être choisis et tolérés pour évoluer aux côtés des Elfes. Dans les villes, Elfes et élus choisis vivaient côte à côte, se mariaient parfois. Et si cela avait duré, sans la traîtrise des humains et des Orks, peut-être régnerait-il aujourd’hui sur Tanaephis une race mi-elfe, mi-humaine, pour le plus grand bien de tous.
Car les Elfes savaient nous modifier. Ils le firent à un autre âge pour se protéger.
Car si tel ne fut pas encore le cas. C’est que l’habileté des Elfes, leur richesse et leur pouvoir leur créaient de nombreux ennemis.
Dans les villages, des humains de mauvaise volonté s’allièrent avec les Orks et attaquèrent des familles Elfes la nuit, dans leurs maisons et par surprise, les massacrant et les dépouillant de leurs biens. De massacres en massacres, de vols en viols, la race elfique aurait pu s’éteindre trop tôt, à ce moment…
Mais les Elfes aussi ont leurs héros. Celui-là s’appelait Ayas'se, et était aussi puissant dans les voies du Fluide qu'il l’était dans les voies des armes. Sa famille avait été tuée par les Orks, et ses soeurs enlevées. La rage l’habitait, et son contrôle du Fluide était puissant. Il réunit les Elfes dispersés dans les villes, forma une armée, délivra les prisonniers ; sans laisser aucun survivant. Les villes humaines craignirent alors de subir des représailles, car si c’était une chose d’attaquer à dix contre un des familles sans défense, c’en était une autre de combattre une armée d’Elfes magiciens menée par un grand sorcier de combat.
Mais Ayas'se n’attaqua pas les petites cités. Il s’enfonça avec tous ceux qu’il avait réunis, les guerriers, les femmes et les enfants dans l’immense forêt, qui à cette époque recouvrait l’ensemble du territoire. Là, il tint une agora avec son peuple : Ayas'se voulait trouver un endroit où tous seraient en sécurité, où ils pourraient se défendre. Il leur fallait une ville, la plus belle des villes, et la plus fortifiée. Une ville où ils pourraient vivre en paix, et exercer leur art. Cette ville, il faudrait la protéger ensuite par des soldats, différents.
Durant ces siècles où ils avaient lentement appris les arcanes de la puissance, ils avaient aussi appris à ne pas se contenter du Fluide qui était absorbé naturellement par leur corps, mais aussi à exploiter celui du monde autour d’eux.
« La ville », dit Ayas'se, « devra être construite au coeur de la force magique du pays, de manière pouvoir la drainer aux quatre points cardinaux. »
Ils se mirent donc à chercher, hommes, femmes, et enfants, Elfes, le coeur du Fluide sur le continent. Chaque parcelle de terre scellant autant de Fluide qu’une autre parcelle de terre, cette tâche aurait dû être simple, et le coeur du Fluide se confondre avec le coeur géographique de Tanaephis. Mais au Sud, les Pères, les Géants dont je vous parlais tout à l’heure avaient drainé beaucoup de force magique. Et il y avait des irrégularités naturelles, et des endroits dans les montagnes où le Fluide était plus fort qu’il n’aurait dû être. Et il y avait surtout, à ce moment, l’arrivée des Armes-Dieux qui elles aussi se nourrissaient de la magie de la Terre…
Aussi l’endroit à trouver : le centre du Fluide, le pôle de toute la magie de Tanaephis restait-il caché.
Ayas'se, au milieu de son peuple qui vivait mille maux dans la forêt – car les Elfes étaient restés trop longtemps dans les cités, et n’étaient plus habitués aux lois de la nature physique – envoyait expédition sur expédition, et toutes revenaient bredouilles. Quand elles revenaient… car la forêt en ce temps-là était encore plus cruelle et profonde qu’elle ne l’est aujourd’hui.
Les années passèrent. Ayas'se prit de nombreuses moitiés parmi son peuple, parfois de force, car il avait un esprit et un règne de fer. Il eut de nombreux enfants et envoya ses fils, dès qu’ils atteignirent l’âge d’adulte des Elfes, à la recherche du lieu de ses rêves.
La construction de cette cité, de cette forteresse, devenait d’ailleurs urgente. En effet, l’arrivée des Armes-Dieux n’avait pas eu pour seule conséquence de bouleverser les niveaux de la magie sur la terre, elle était aussi en train de faire pencher de nouveau la balance du pouvoir du côté des humains. Car ceux-ci pouvaient se lier avec les Armes-Dieux, alors que les Elfes ne le pouvaient pas. Un Elfe qui prenait une Arme-Dieu la sentait se dessécher entre ses mains, comme s’il pompait le Fluide qui était dedans – et tel, en effet, était le cas. L’Arme n’avait alors plus aucun pouvoir, et l’Elfe était transcendé et désorienté pendant quelque temps par le soudain afflux de Fluide qu'il lui était impossible de combattre.
Les raids des humains contre le peuple Elfe redevinrent nombreux et meurtriers, et Ayas'se souffrait, car il devait repousser non seulement les attaques externes, mais aussi celles internes de son propre peuple qui estimait que son rêve était vain et qu’ils allaient tous mourir pour rien, à rester groupés ainsi au milieu de la forêt, vulnérables aux attaques de leurs ennemis… au lieu de suivre les préceptes de Moreau’se, et sa voie de la magie génétique.
Et le premier de ces rebelles, qui colportait la pensée de renonciation à la fable du « centre du Fluide », pour choisir l’autre voie, celle de Moreau’se, celle qu’Ayas'se refusait la trouvant trop cruelle et sans humanité pour – justement – l’humanité, ce rebelle, qui avait tout le charisme d’Ayas'se et plus de jeunesse, était son propre fils, Serys'se. Et Serys'se avait un époux très beau, dénommé Aïs’se, qui l’aidait à monter la rébellion contre son père.
Les discours de Serys’se et d’Aïs’se portèrent leurs fruits, et le peuple Elfe exigea une nouvelle agora, un changement de politique et d’avenir. Ayas'se fut obligé de céder, car les Elfes se plient à l’unité de leur raison et pensée collectives, et là, sous la clarté de Taamish, le peuple dit sa révolte et sa haine contre la tyrannie guerrière utopiste d’Ayas'se, oubliant que c’était cette tyrannie qui, en les réunissant et en leur permettant de se battre, les avait sauvés tant de fois de la destruction évolutive des primitifs. Ayas'se allait être désavoué à une simple pensée individuelle, quand, par le plus grand des hasards, ou des miracles, une des expéditions envoyées chercher le Fluide il y a des années, et que tous croyaient perdue, fit son apparition dans le cercle d’arbres et de rochers où se tenait l’agora. Ayas'se hurla de joie et de bonheur, levant ses bras vers le ciel étoilé et laissant couler des larmes de joie. Serys’se et Aïs’se restèrent silencieux, comme nombre des opposants d’Ayas'se qui voyaient là, une fois encore, chez Ayas'se, la démonstration qu’ils ne savaient plus tolérer : des émotions primitives. Le peuple Elfe, lui, était confus. Ayas'se parla, parla encore du refuge où ils seraient en sécurité, de l’union du peuple Elfe dans un endroit où ils pourraient, mieux que tout autre, contrôler et manier les forces du Fluide.
Ayas'se parlait bien, et c’est cet art de la parole qui lui avait permis de tenir ses idées pendant toutes ces années. Mais ce discours, combien de fois déjà l’avait-il répété ? Il avait perdu sa magie à force d’être rabâché : dans les yeux des Elfes qui l’entouraient, dans leur connexion, Ayas'se ne lut que le doute et la fatigue. Il se sentait isolé.
Et pourtant, bien qu’il ait maintenant un goût de cendre comme un rêve trop vieux, et bien qu’Ayas'se, qui exprimait ce rêve, ne soit au fond qu’un Elfe violent et assoiffé de puissance, le discours n’en était pas moins véridique.
Et l’avenir l’a prouvé, qui, s’il n’a pas empêché la race des Elfes de choisir l’autre voie, celle de Moreau’se, de devenir ceux que nous avons l’habitude de connaître dans nos récits, les scientifiques généticiens, puis de s’éteindre, comme toutes les chimères, le rêve d’Ayas’se et la cité qu’il a construite leur a permis de rester dans toutes les légendes…
Serys’se prit alors la parole et leur parla à son tour. Non de rêves et de villes, mais des malheurs et des obstacles qui les attendaient pendant leur voyage, de ceux qui n’y survivraient pas, des années d’efforts qui seraient nécessaires avant qu’une telle cité soit construite – si elle l’était jamais. Et ce discours-là, le peuple Elfe le comprit. Il entra en résonnance.
Ayas'se sentit qu’il était en train de perdre la partie. Alors il sortit son coutelas de pierre de Carmina et attrapa son fils par le bras. Un instant peut-être, Serys’se crut-il à un geste d’affection, une affliction d’émotion en lui-même : comme si son père avait entendu son discours et en avait été convaincu. Serys’se s’en convint. Et c’est pour cela qu’il ne réagit pas tout de suite à la lueur de meurtre d’Ayas’se et aux cris de pensées que poussa Aïs’se. Quand il leva le bras pour se défendre il était trop tard, et Ayas'se lui trancha la crinière d’un geste net et précis, et son Fluide, son sang en grandes gerbes éclaboussa les assistances.
Ayas'se jeta le corps de son fils, attrapa Aïs’se et le frappa de son poing nu. Tel un primitif. Puis il dit qu’il ferait la même chose aux traîtres et à tous ceux qui oseraient s’élever contre sa décision. Il les tuerait et prendrait leurs conjoints dans la honte et la douleur de la symbiose pour les faire siens et siennes.
Dans l’agora, ce ne fut que tumultes et cris, primitifs eux aussi, et dans le plus grand désordre certains s’élevèrent contre Ayas'se, les émotions et pensées de révolte, de vengeance, de cruauté, de violence, à la main. D’autres prirent son parti, et Taamish brilla sur cette scène où les Elfes s’entre-tuèrent, tels des humains, où le frère tua le frère et le père son fils dans la rage et le désespoir… d’un rêve.
Quand l’aube se leva, beaucoup pleuraient. Le parti d’Ayas'se avait naturellement gagné, et il se retira sous sa tente en emmenant Aïs’se de force. Et les mauvaises langues dirent d’ailleurs qu’Ayas'se convoitait les gènes de l’époux de son fils depuis longtemps déjà, et que ce n’était pas seulement sa rébellion qui l’avait poussé à le tuer. C’était faux. Ce n’étaient pas ses envies.
Il se passa cinq ans avant que le peuple d’Ayas'se n’atteigne l’emplacement désigné, cinq ans où, comme l’avait prédit Serys’se, de nombreux Elfes périrent tués par les fatigues du voyage ou les attaques des autres espèces.
Mais un jour ils virent la plaine, et la forêt, et les rochers de calcaire et d’albâtre. Et Ayas'se arrivant au centre de la plaine, y planta son coutelas pour désigner l’endroit où serait bâtie la ville, et il rit de joie. Il pleura aussi.
Aïs’se, qui l’accompagnait comme le faisaient toutes ses moitiés, de gré ou de force, était alors enceint et presque à son terme. Est-ce qu’il vit, en voyant Ayas'se rire, le visage de son bien-aimé assassiné devant ses yeux ? Ou est-ce qu’il voyait la dérision de sa propre existence, de ses propres espoirs et de ses propres rêves ? Ou est-ce qu’il se h-Aïs’se-ait de n’être pas mort, de n'être pas seul, et plus encore de porter l’enfant de l’être qu’il abhorrait ? En tout cas, ivre de rage et de haine, ses émotions, en voyant les ambitions d’Ayas'se se réaliser, il arracha le coutelas de terre et voulut le planter dans la figure d’Ayas'se.
Celui-ci était un guerrier accompli, il évita le coup, attrapa le coutelas et par pur réflexe, frappa – il eut voulu retenir son geste, mais il était trop tard.
Aïs’se chancela, mais resta debout, et Ayas'se crut d’abord qu’il n'était que légèrement blessé. Le jeune Elfe se mit alors à rire, d’un rire étrange et saccadé. Puis à pleurer, et soudain, avant qu’Ayas'se puisse l’arrêter, il proféra l’interdit : une terrible malédiction, sur la ville qui allait être construite là, sur les habitants qui viendraient y vivre, sur les rois et chefs qui y régneraient. Et elle disait, cette malédiction :
« … que la Mort planerait toujours sur la ville, que tous les royaumes dont la cité serait la maîtresse s’écrouleraient dans les cendres et dans le sang, et que… » mais je n’en répéterai pas plus les termes aujourd’hui, car ils sont noirs et désespérés.
Puis Aïs’se s’écroula, et mourut.
Ayas'se ne fit que rire, en apparence, et la ville fut construite.
Ayas'se la dénomma Pôle, car elle était au pôle de la force magique de Tanaephis.
Cette ville, vous la connaissez ; elle a vu la fin de l’Empire Elfe, et verra bientôt celle de l’Empire Dérigion.
Et il en sera ainsi à jamais, car la ville a été construite dans le sang et la haine, et elle est maudite à jamais.
Ceci est la fin de mon conte. Mais je n’ai pas l’exclusivité, et il y a quelque chose qu’il faut que je vous dise…
Alors que je voyageais dans les jungles gadhars, et que je profitais de l’hospitalité d’une tribu, j’entendis raconter cette histoire par une sorcière-qui-délivre d’environ cinquante ans. C’était bien la même légende, et la vieille femme noire parlait d’Ayas’se, de son fils et de son époux avec une éloquence qui n’enviait rien à la mienne, je dois l’avouer. J’écoutais avec toutes mes oreilles, car il est toujours intéressant, pour nous les bardes, d’étudier les « trucs » par lesquels les autres donnent vie à leurs imaginaires. J’écoutais toujours quand la femme raconta la mort d’Aïs’se, et sa malédiction. Je croyais alors qu’à l’instar du mien le conte était fini. Il n’en était rien ; et voici donc une autre fin pour ce conte :
Quand il tomba sous le coup de coutelas d’Ayas'se, Aïs’se, je l’ai dit, était en grossesse. Les Elfes le pouvaient. Alors que son cadavre gisait à terre, les autres de la même pensée se précipitèrent vers lui pour voir s’ils pouvaient lui porter secours.
Il était trop tard, et Aïs’se avait rendu le dernier soupir…
Cependant, dans son ventre, le bébé bougeait encore, et était-ce le choc de la mort, ou autre chose, les contractions de la séparation avaient commencé.
Alors ils transportèrent le cadavre d’Aïs’se sous un abri et, chose étrange et miraculeuse, les contractions continuaient. Et l’enfant naquit, vivant, sans qu’il fût même besoin de l’assister de leur Fluide.
L’enfant fut aimé par Ayas'se, et grand en force et en beauté.
Fin ! Ce qui vous en conviendrez n’est pas du tout bon pour mon histoire car j’aurais aimé, afin de clore ma légende sur une fin grandiose, tragique comme tout le monde aime, raconter comme cet enfant en grandissant ne pensa qu’à venger Aïs’se et comment, à l’âge adulte, il poignarda à son tour Ayas'se. Une belle fin en vérité, cela aurait été ; mais non !
La vieille Gadhar dit au contraire que l’enfant rendit à son père tout son amour, et qu’il devint un Elfe puissant et généreux, qui répandit le bien autour de lui, et vécut très heureux. Jusqu’à l’âge d’or…
Et elle en tira une morale, disant que de tout ce qui était très mauvais il sortait parfois quelque chose de bon. Et que la malédiction d’Aïs’se était contrée, un peu, par la naissance de son fils qui était la mort, la vie, la renaissance, l'espoir… Et ainsi, dit-elle, Pôle est la fois maudite et bénie, et malgré tous les maux qu’elle subit, un jour viendra du sein de la cité le renouveau d’un avenir plein d’espoir…
Je ne sais quelle fin vous préférez, quant à moi, je vais me rafraîchir le gosier !